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Comme un air de famille

Comme un air de famille

Du comité d’entreprise d’Air France, on a retenu des images : chemises déchirées, regard affolé de deux cadres dirigeants de la compagnie. À l’heure où la justice s’est saisie de ces graves incidents et que la tension semble un peu retombée, deux points, trop peu soulignés, à chaud, méritent toutefois d’être rappelés.

Le premier est le slogan des manifestants, le 5 octobre : «on est chez nous». Ce fut autrefois celui des supporters du PSG que les dirigeants du club tentaient d’écarter afin d’éviter les débordements dont ils étaient coutumiers. C’est surtout aujourd’hui, celui qu’on scande dans les réunions du FN. Il n’est pas question ici de suggérer que les syndicalistes en colère, à Air France, sont des lepénistes cachés. Mais il est quand même significatif qu’ils n’aient pas mesuré que leurs slogans n’appartenaient pas à la tradition de leurs organisations. Du «tous ensemble», on passe au «on est chez nous». Ce n’est pas grand chose mais cela dit, pour le moins, un rétrécissement du propos où l’affirmation d’une solidarité a laissé place à la revendication d’une identité.

L’autre point passé sous silence concerne l’un des dirigeants d’Air France, pris à partie et molesté. L’un d’entre eux que tout le monde a pu voir à la télévision s’appelle Pierre Plissonnier. Il est responsable long-courrier de la compagnie. C’est aussi le fils de Gaston Plissonnier. Ce dernier fut l’un des dirigeants du PC de l’ère Marchais. Peu connu du grand public, il fut considéré, jusqu’à sa mort en 1995, comme le plus fidèle relais du grand frère soviétique, place du Colonel Fabien. Lorsque Georges Marchais fut contraint de prendre un peu de champ avec la politique active, en 1976, Gaston Plissonnier ne fut pas chargé pour rien d’assurer son intérim, comme secrétaire général.

Son fils, Pierre, n’est pas à un militant et on ne lui connaît aucun engagement politique affiché. N’empêche ! Que ça soit à lui que des syndicalistes CGT, sans doute ignorants du pédigree de leur victime, s’en soit pris, le 5 octobre, est un hasard troublant. Au PC, en tous cas, Pierre Laurent qui, lui aussi est un fils de dirigeant communiste de la génération Plissionnier, n’a pas été le dernier à noter que, dans les vieux liens de solidarité de la grande famille communiste, quelque chose s’était définitivement brisé.